Habyarimanisation, mugabisation et stalinisation,
les métamorphoses d'un tyran
Sous la plume de Jacqueline Umurungi, le président du Rwanda nous est révélé sous tous les aspects de sa mugabisation. « Is Rwanda under Kagame becoming the next Zimbabwe? » C'est sous ce titre (paru ce 26 décembre 2012 sur le site http://www.inyenyerinews.org) que l'auteure de l'article explique les misères qui guettent le peuple rwandais suite à l'entêtement de leur président. Les aventures belliqueuses de ce dernier ont déjà fait se fâcher plusieurs donateurs qui ont fermé le robinet des aides pourtant si précieuses au budget du Rwanda. Malgré le signal d'alarme que tire son ministre des Finances par rapport à cette situation, le premier des afande se comporte toujours en l'enfant gâté qu'il était encore hier, lorsqu'il faisait chanter le monde entier suite au génocide rwandais. Les temps changent et là où l'historien Gérard Prunier voyait un régime qui se habyarimanise à la vitesse grand V, l'on croit aujourd'hui découvrir une réplique du Zimbabwe périclitant de Robert Gabriel Mugabe. Sauf que, en grattant un peu plus le portrait, on voit apparaître... Staline.
Tout dans Kagame rappelle en effet le « petit père des peuples », grand bourreau des Soviétiques devant l'Éternel. De l'enfance à ses guerres en passant par une gestion dictatoriale du pays, les similitudes entre les deux personnages sont éminemment frappantes qu'il n'est pas vain de s'y arrêter un instant. Tout d'abord leur enfance. L'un et l'autre ont vécu une enfance dans la misère. Staline naît dans un village pauvre ; Vissarion, son père, est cordonnier. Il est aussi alcoolique et n'éprouve pour son fils rien d'autre que de l'indifférence. L'enfance du dictateur est rude, sans chaleur. L'argent manque. Son équivalent rwandais n'est pas mieux loti : en exil, Kagame perd son père et mène une vie de réfugié dans un camp, celui de Nshyungerezi. Il ne peut être scolarisé normalement par manque de moyens. (He benefited from financial assistance via a family friend based in Belgium that enabled him to continue his schooling).
Ensuite, tout comme Staline, Kagame prend le pouvoir alors que ses amis s'y attendent le moins. Le premier passe pour un personnage insignifiant pour ses camarades et personne ne s'imagine qu'il pourra succéder au grand Lénine et qu'il exécutera dix ans après tous les prétendants sérieux à cette succession. L'un de ceux-ci déclare : « Staline est la plus éminente médiocrité de notre parti », un autre confirme : « nous ne craignons pas Staline, aussitôt qu'il voudra prendre de grands airs, nous l'éliminerons ». Presque les mêmes remarques qui ont été formulées à l'endroit du chétif Kagame. Mentally and physically unfit disaient ses camarades de lutte. (Iossif) Vissarionovitch Djougachvili sera surnommé Staline (l'homme de fer), Paul Kagame se contentera du peu glorieux Pilate.
Dans leur ascension, les deux hommes ont du s'appuyer sur des icônes dans le sillage desquels ils ont patiemment attendu leur heure. Lénine pour Staline et Museveni pour Kagame. Alors que l'un a participé avec Lénine en 1917 à la grande révolution qui a renversé le tsar, l'autre a participé en 1981 avec Museveni à la guérilla qui a eu raison de Milton Obote. Tous deux ont par ailleurs réussi, grâce à des manœuvres dans leurs partis, à écarter l'homme le plus important du moment. Trotski en 1924 et Rwigema en 1990 puis Kanyarengwe en 2001. Lorsqu'ils arrivent au pouvoir, la volonté chez les deux de faire table rase du passé est on ne peut plus manifeste. Alors que Staline supprime brutalement les traces de la vieille Russie, qu'il décrète que la religion est contraire aux intérêts du peuple, qu'il fait décrocher les vieilles icônes orthodoxes dans tout le pays avant de les détruire, Kagame, lui, a déterré le président Dominique Mbonyumutwa, a débaptisé l'aéroport, fête le 4 au lieu du 5, a changé le découpage administratif du pays, etc. Pour l'Urss, Staline éprouve une ambition sans bornes alors que Kagame se plaît à défier ses bailleurs de fonds, attaque le Congo, menace son ancien parrain, l'Ouganda. Ils ont, ce faisant, gagné les titres de « guide éclairé des communistes » pour Staline et « afande Political Coordinator » ou « Mzee kijana » pour Kagame.
Par des gigantesques chantiers, le soviétique voudra moderniser la Russie à marche forcée pour en faire le paradis des ouvriers tandis que le rwandais est guidé par une fixation : celle de transformer son pays en un tigre économique selon le modèle de Singapour.
Au fil de leurs règnes respectifs cependant, des mauvaises nouvelles s'invitent : la pauvreté se généralise, le manque de logements devient criant, la malnutrition s'installe. Le rêve communiste se fissure, mais Staline fait la sourde oreille et cherche des coupables chez les responsables de l'économie. Expérimentant pareille épreuve, Kagame commence par s'emporter contre les génocidaires qu'il a vaincus et les rend responsables de tout ce qui ne fonctionne pas au Rwanda. Il s'en prend ensuite à tous les Occidentaux qui dénoncent sa main de fer, mais surtout les guerres qu'il provoque chez son voisin pour mieux le piller.
Alors qu'une famine sévit dans la riche Ukraine, Staline interdit aux paysans affamés de quitter leurs villages pour les grandes villes, condamnant ainsi 5 millions de personnes (un des plus grands massacres du siècle dernier). Ceci ne l'empêche pas d'inviter des étrangers (le député français Édouard Heriau visitera ainsi en train le pays, il est satisfait et hausse les épaules lorsqu'on lui parle de famine) qui viennent voir (come and see ?) les progrès du communisme. Ces millions de morts rappellent les quelques 5,4 millions de personnes mortes à cause du conflit et de la crise humanitaire provoqués dans la République démocratique du Congo par la cupidité du président Kagame (selon un rapport de l'International Rescue Committee).
On peut égrener comme cela les points qui rapprochent les dictateurs Paul Kagame et Joseph Staline :
- les techniciens : les journalistes et les cinéastes doivent désormais décrire le monde non pas comme il est, mais comme il devrait être ! Des chiffres truqués, invente des héros. « Falsifier les chiffres, les factures, les rapports est courant dans les services de l'État rwandais à qui ces pratiques font perdre des milliards ». (Fulgence Niyonagize sur le site http://syfia-grands-lacs.info)
- Kolkhoze / imidugudu
- gigantesque état policier (agents de Staline sont partout, embarquant et déportant la population n'entrant pas dans le moule du régime vers des camps de travail, les goulags). L'omniprésence des services de sécurité de Paul Kagame fait dire à beaucoup que le Rwanda est tout simplement un état-garnison. Des enlèvements, des internements ou des déportations vers divers camps dont celui d'Iwawa sont malheureusement fréquents.
- à l'étranger on est loin d'imaginer l'horreur stalinien Pourquoi ? Staline a « rendu leur fierté aux ouvriers ». Ah oui ? Kagame a, lui, rendu leur dignité aux Rwandais. Agaciro ça se dit.
- Staline a liquidé toute la génération qui lui fait encore de l'ombre : son plus proche compagnon Boukharine (un ami de 15 ans mais qui l'a contredit plusieurs fois) est torturé puis fusillé (et sa famille déportée). Le compagnon de Kagame, le général Kayumba est accusé de tous les crimes (complot, trahison, gabegie, etc.) ; il sera condamné à 24 ans de prison avant de survivre à des tentatives d'assassinats commandités par Kagame.
- Staline devient paranoïaque, encourage la délation et compte sur la loyauté d'un homme de main Nikolai, dit « le Nabot ». Ce chef de la police secrète qui instaure la grande terreur (1000 personnes exécutées par jour) rappelle les empoisonneurs d'Afandie.
En conclusion, il y a lieu de se demander jusqu'où ira cette métamorphose ? Y aura-t-il une prise de conscience de la part de notre Kagame national ? Quelles seront les conséquences de ce processus ? Dans son insensibilité extrême, Staline n'a pas voulu échanger son fils fait prisonnier par les Allemands contre un maréchal nazi. Le pauvre mourra en essayant de s'échapper. La honte pour un père. Prions pour que le soldat Cyomoro ne puisse un jour se retrouver dans pareille situation. Et surtout qu'à la mort de son général de père, il n'y ait pas ceux, comme les déportés du camp de Borkuta, qui disent « Que le diable emporte son âme » et « aujord'hui, grâce à Dieu, l'homme à la moustache est parti en enfer »...
C Kami
(Inspiré du documentaire Staline, le tyran rouge)
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